Le machine learning : un élément clé d’optimisation des processus industriels aéronautiques
Dans le long processus qui sépare la conception d’un avion et sa fin de vie, plusieurs niveaux de contraintes interfèrent. Usure des pièces, immobilisation des avions, sécurité des passagers… tout cela engendre des enjeux financiers, économiques et humains importants. Chez Safran Engineering Services, le machine learning, est au centre d’avancées majeures qui permettent d’optimiser la gestion des cycles de vie des produits et la fiabilité des équipements.
Le machine learning, une opportunité pour le secteur aéronautique
Le machine learning est devenu une composante incontournable de la productivité en entreprise, et la data, la donnée, en est le carburant. Le machine learning ou « apprentissage automatique », est un cas d’usage concret de l’intelligence artificielle dans le domaine industriel. C’est la mise en place d’un programme permettant à un ordinateur ou à une machine un apprentissage automatisé, de façon à pouvoir réaliser un certain nombre d’opérations très complexes. Un algorithme génère le système d’apprentissage, et la machine apprend en incorporant automatiquement le résultat de ces opérations, dans un processus d’enrichissement continu. Sylvain Tanguy, Leader Data Science et Marc Lutrot, responsable des activités Data & Pronostics Health Monitoring chez Safran Engineering Services décryptent pour nous la chaine de valeur liée à l’utilisation de cette technologie…
« Ce qui se passe actuellement dans l’aéronautique est très intéressant. Dans les usines dites 4.0, les machines et les outils sont désormais connectés et les processus de plus en plus informatisés. Les données qu’ils dégagent sont de véritables atouts, à partir desquels nous créons des algorithmes qui vont permettre à la machine d’identifier des modèles, de les enrichir et de faire des prédictions optimisées. En vol, la production de données est quelque chose qui a toujours existé mais leur récolte et leur exploitation est en pleine expansion… Les nouveaux programmes aéronautiques sont conçus pour être largement instrumentés. Une grande partie des pièces sont équipées de capteurs et l’ensemble des données sont collectées, agrégées et exploitées, notamment via le machine learning, pour permettre ensuite de mieux statuer sur les actions nécessaires à prendre sur l’avion durant son cycle de vie. Cela permet de surveiller tous les équipements embarqués, et de considérablement enrichir la masse de données collectées, ce qui ouvre là encore de nombreuses opportunités », explique Marc Lutrot.
Ainsi, le machine learning permet non seulement d’accroître la durée de vie des pièces aéronautiques mais également d’anticiper les pannes et réduire les interruptions d’exploitation. Cette technologie est appliquée dans les trois domaines du processus industriel que sont le dimensionnement, la production et le suivi en exploitation.
Optimiser le dimensionnement…
Lorsque l’on fait de la conception aéronautique, le dimensionnement est l’étape qui consiste à déterminer les dimensions physiques les plus appropriées pour chaque pièce. « Aujourd'hui, les outils mathématiques traditionnels de modélisation reposent sur une approche principalement théorique. La théorie n’étant pas la réalité, et afin de garantir une sécurité maximale, nous prenons en compte un grand nombre d’hypothèses conservatrices, à mêmes de couvrir toute marge d’erreur. Cette contrainte a pour conséquence un surdimensionnement de certaines pièces aéronautiques. Grâce au machine learning et aux données réelles récupérées sur l’appareil, nous pouvons créer des modèles d'apprentissage permettant de nous approcher de la réalité pratique. Bien sûr, cette méthode ne se substitue pas aux méthodes classiques. Elle vient les compléter assurant ainsi un meilleur dimensionnement et une meilleure espérance de vie pour l’avion », précise Sylvain Tanguy. Dans ce domaine, Safran Engineering Services travaille, par exemple sur la création d’algorithmes permettant d’optimiser les charges de l’avion dès la phase de conception du fuselage.
Monitorer les processus de production
Au-delà de l’amélioration qualitative des pièces produites, le monitoring (la supervision) de la production permet, en reliant ses données à celles de l’exploitation, de mieux comprendre le cycle de vie de la pièce, ce qui n’est pas sans conséquence sur celui de l’avion. « On travaille notamment sur la digitalisation de nos plans de conception. Nous extrayons la donnée numérique et textuelle de nos plans papier via une technique de reconnaissance d’image fondée sur un réseau de neurones. Nous créons à partir de cela des bases de données digitales qui permettent par la suite de mieux suivre le produit, d’anticiper des défaillances, d’analyser des corrélations, de retrouver des causes racines, etc… », explique Sylvain Tanguy.
Proposer des services de maintenance prédictive…
Enfin, le cycle d’exploitation d’un avion est ponctué de plans réguliers d’inspection qui permettent de vérifier l’état des pièces embarquées. Mais un avion immobilisé au sol qui se solde par l’annulation du vol coûte très cher à la compagnie. Il y a donc un enjeu économique fort. « La valeur ajoutée de ces nouvelles technologies est leur capacité à prévoir ces pannes, à permettre une livraison des pièces nécessaires par anticipation voire à traiter les défaillances en amont avant qu’elles ne se produisent, réduisant ainsi les coûts d’exploitation », poursuit Marc Lutrot. C’est ce que l’on nomme la maintenance prédictive. « Aujourd’hui, Safran Engineering Services parvient, par exemple, à anticiper les défaillances sur des trains d’atterrissage en exploitant des données en vol », continue-t-il.
Encore à l’état de prospective, le monitoring complet - de la production à l'exploitation - pour chaque avion reste un objectif à atteindre mais nul doute qu’il constitue un enjeu fort à court-moyen terme pour Safran Engineering Services. Dans ce nouveau monde du 4.0 où les algorithmes s’auto-développent, produisent toujours plus de complexité et semblent s’affranchir de l’homme, on pourrait craindre que ce dernier finisse par trop s’en remettre à la « machine ». Il n’en est rien, le machine learning reste encore aujourd'hui un outil au service de la décision des experts métier.
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